Ma petite réaction au sujet de la demande d’asile politique d’Assange a fait jaillir dans ma timeline les commentaires de beaucoup de réactionnaires. * Les juristes qui sa cachent derrière le droit pour dire que la demande d’Assange est irrecevable (je pourrais les qualifier de collabos : dans une dictature, si tu te caches derrière le droit, c’est que tu acceptes la dictature). * Les extrémistes de droites, partisans d’un État fort et autoritaire qui ne trouvent rien à redire à ce que nos gouvernements nous surveillent et commettent des crimes au nom de notre bien. * Les cyniques qui estiment qu’Assange n’a rien fait d’important sinon faire parler de lui pendant qu’eux-mêmes passent leur temps à discuter de cul et des stars du showbiz (et qui ne rêvent que de faire parler d’eux — Assange est en quelque sorte leur concurrent). * Les mercantiles qui affirment que la France ne peut se mettre à dos la communauté internationale. * Les nationalistes qui m’ont suggéré de rendre ma nationalité française puisque je ne suis pas fier d’être Français (comment leur faire comprendre que je ne peux être fier de quelque chose qui m’a été donné sans que je lève le petit doigt, c’est aussi con pour moi que de dire que je suis fier d’être humain ou mâle).
Ce bruit nauséeux, qui frise avec les pensées les plus brunes de notre histoire, m’a fait deux secondes me mettre à la place d’Assange. Si j’étais lui, qu’est-ce je ferais ? Je connais bien mal son dossier, son histoire, mais, à le lire, il me semble qu’humainement le statu quo ne peut pour lui se prolonger. Donc, je me livrerais à la police britannique, avec force avocats autour de moi, TV et tout le reste.
- Parce que Wikileaks n’a plus besoin de moi pour continuer son œuvre.
- Parce que même si je n’ai plus aucune confiance dans les systèmes judiciaires occidentaux (qui s’autorisent à espionner, tuer, manipuler comme Wikileaks l’a révélé à de multiples reprises depuis 2006), j’ai confiance en mes amis politiques dispersés aux quatre coins du monde (et je suis sûr qu’ils feront tout pour me venir en aide).
- Parce que si je suis immédiatement extradé vers les États-Unis plutôt que jugé pour viol en Suède, tout le monde aura la preuve que cette accusation n’était qu’un coup monté.
- Parce que, pour mes amis politiques, je ne peux laisser planer le doute quant à ma probité. Je veux que cette accusation de viol soit définitivement éclaircie.
- Parce que je suis dans une situation invivable.
- Parce que la meilleure défense est parfois l’attaque.
Mais je ne suis pas Assange, je ne suis pas en position de me faire interner, d’être faussement accusé de crime… et peut-être vaut-il encore mieux vivre dans cinq mètres carrés en pouvant communiquer avec le monde que dans une cellule coupée du monde. Tant qu’Assange est connecté, il nous est utile.