Je m’étais promis de ne plus trop publier, de laisser passer tranquillement l’été, remettant en forme de vieux manuscrits avant d’aller me baigner avec les enfants. Et puis François Bon s’attaque au prix unique du livre numérique, et il réveille une vieille rengaine chez moi, et une bouffée d’énervement me traverse. Alors j’écris, vite, pour me débarrasser de tout ça avant de retourner à mes manuscrits et à ma plage.
Quelle est cette mascarade de prix unique du livre ? Qui ose encore ainsi justifier cette loi censée protéger les petites librairies face aux grosses librairies ? Croyez-vous que les petites librairies soient à égalité avec les grosses et avec les chaînes d’hypermarchés ? Que nenni.
Si le prix du livre est bien unique, les remises accordées aux libraires varient du simple au double. C’est-à-dire que quand vous achetez un livre chez Carrefour, Carrefour gagne deux fois plus que si vous achetez ce même livre dans votre librairie préférée où vous allez en même temps boire l’apéro. Je me demande d’ailleurs de quoi vivraient les petits libraires s’ils ne préparaient pas de bonnes tapas ?
Le prix unique n’a pas pour vertu de protéger les petits libraires, mais d’augmenter la marge des gros. Vous allez dire que ça protège au moins les éditeurs et les auteurs, car, les prix étant plus élevés, ils touchent plus de dividendes. Faux. La distribution a le don de pressuriser les éditeurs et de les saigner. Seule la distribution profite de cette loi.
Et on voudrait l’imposer au numérique. Ça vous surprend ? Pas difficile de savoir qui a tout à y gagner : la distribution. Pour nous auteurs, ça ne fait aucun sens, pas plus que pour les librairies qui j’espère seront de plus en plus nombreuses à vendre des livres numériques.
En plus, la loi est inapplicable. Un prix unique a un sens avec un objet unique. Déjà, un poche n’est pas au même prix qu’un livre relié. Avec l’impression à la demande, on peut déjà créer un livre sur mesure par acheteur, proposer une multitude de formats, de couvertures, de préfaces, de postfaces… La notion d’objet unique n’existe plus, pas plus que celle de prix unique.
Allez, circulez, retournez à la plage.