Octobre 1900. L’été s’achevait en Méditerranée. Le capitaine Dimitrios Kondos estima qu’il devenait dangereux de poursuivre les plongées sous-marines le long des côtes africaines. Il ordonna à son équipage de pêcheurs d’éponges d’appareiller vers la Grèce. Une tempête automnale les força à s’abriter dans le port de Potamos sur l’île d’Anticythère, au large de la Crête.
Le vent du sud se calma, mais le capitaine jugea la météo encore instable. Il préféra mouiller quelques jours et ses hommes en profitèrent pour effectuer quelques ultimes plongées. Avec leur scaphandre, ils explorèrent les eaux cobalts au pied des escarpements rocheux.
Elias Stadiatos se trouvait à 60 mètres de fond lorsqu’il tira sur la corde de sécurité. Il émergea en criant qu’il avait découvert des cadavres d’hommes et de chevaux. Croyant qu’Elias souffrait de l’ivresse des profondeurs, le capitaine plongea à son tour. Il s’approcha d’une silhouette fantomatique enrobée de sédiments. Il lui saisit le bras et l’arracha, c’était le bras en bronze d’une statue antique. Les pêcheurs avaient découvert l’épave d’un navire romain qui aurait sombré vers 65 avant Jésus-Christ alors que, chargé de trésors, il regagnait l’Italie .
Durant les deux ans qui suivirent, les archéologues explorèrent le site. Le 17 mai 1902, ils notèrent non loin de l’épave une roue avec engrenages enchâssée dans un rocher. C’était comme si une horloge avait été immergée durant deux millénaires. Mais les horloges de cette complexité ne furent inventées qu’au xixe siècle par les horlogers suisses !
-- Cet appareil est tout simplement extraordinaire, expliqua le professeur Michael Edmunds qui étudia ce mécanisme . Le seul de son espèce. Au regard de sa valeur historique, je le considère comme plus précieux que la Joconde.
Michael Edmunds et son équipe découvrirent sur les engrenages des inscriptions qui laissent supposer une origine syracusaine du mécanisme et qui le rattachent au iiie siècle avant Jésus-Christ et à Archimède . Celui que l’on considère souvent comme le plus grand mathématicien et ingénieur de tous les temps aurait été le créateur du mécanisme, tout au moins d’un de ses prototypes, car le modèle exhumé fut assemblé entre 150 et 100 avant Jésus-Christ.
Les anciens construisirent cette horlogerie pour prévoir la position des planètes et anticiper les éclipses. Des engrenages et des roues de bronze représentaient le soleil, la lune, la terre et leurs orbites. Quand ils s’animaient, ils imitaient l’univers, ils le simulaient.
Ce modèle réduit est l’ordinateur analogique le plus ancien dont nous possédions des vestiges. Ils témoignent d’un art et d’un niveau de technologie que nous ne soupçonnions pas durant l’antiquité. Quel aurait été le cours de l’histoire si les Romains n’avaient pas délaissé les innovations grecques ? Artur C. Clarke, l’auteur de 2001 l’Odyssée de l’espace, affirme que nous aurions déjà atteint les étoiles.