Faire payer des articles partout disponibles sur le Web est aujourd’hui utopique. Faut être désespéré pour imaginer un tel retour en arrière. Il faudrait garantir l’originalité des textes. Et comment empêcher d’autres journalistes de les lire et puis de les réécrire ? Impossible. La presse ne fait que se recopier elle-même. Pour une information neuve, nous en avons mille dupliquées. Et je suis sans doute loin du compte.
L’idée d’information neuve n’a d’ailleurs guère de sens puisque ce n’est pas le journaliste qui fabrique cette information mais un informateur. La source est généralement gratuite. Pourquoi après faire payer ce qu’elle a dit en déformant plus ou moins et en mettant soit disant dans le contexte. C’est un travail trop facile, d’autant plus facile à l’heure du Net, un travail que trop de monde sait faire relativement bien (et je ne parle pas des chroniques et des éditos dont le Web regorge). Au temps des propulseurs, vu l’abondance des plumes, nous aurons toujours à lire des articles gratuits.
Le business de la presse est mort. Ce n’est pas un scoop. Mais s’il devient impossible de faire payer des articles courts, il reste encore possible de faire payer des textes longs. Des documents. Des essais. Des romans. L’économie de l’édition tient debout tant que les readers ne sont pas omniprésents, et c’est une économie avec un ticket d’entrée bien moins élevé que celui de la presse. Nous sommes dans une période de transition, sans doute courte, mais qui laisse des opportunités de business.
Il faut que les journalistes cessent de se satisfaire de pondre deux ou trois feuillets de temps en temps pour nous proposer des choses qui tiennent debout, des choses qui demandent un peu plus d’approfondissement, un peu plus d’attention, un travail d’écriture.
J’ai évoqué cette piste avec Jacques Rosselin sur Twitter :
@rosselin Si l’économie de la presse est malade, celle du papier tient encore... c’est peut-être un business pour toi ;-)
Jacques, fondateur de Courrier International, a lancé l’année dernière Vendredi. Il a suspendu la publication depuis l’été. Pas simple de propulser un nouveau canard quand même les titres installés font grise mine. Et ça va pas s’arranger.
Pourquoi ne pas reprendre cette idée sous une autre forme. Pourquoi publier des textes courts comme tout le monde et se planter comme tout le monde. Ne faut-il pas voir les blogueurs comme des auteurs potentiels ?
Avec Le syndrome du poisson rouge, Agnès Maillard a cherché à se propulser toute seule. Je ne crois pas que ce soit la bonne solution. Comme le remarque souvent François Bon, il faut faire communauté. Il faut que les auteurs se propulsent les uns les autres. Il faut qu’ils se relisent les uns les autres. Qu’ils rehaussent la qualité de leur travail respectif. Un éditeur peut servir de liant à une nouvelle force littéraire qui prendrait source sur le Web.