Les 60 % d’abstention aux élections européennes ne m’ont pas surpris. Les gens votent moins parce qu’ils ont compris, au moins inconsciemment, que la représentation ne les servirait en rien, d’autant plus lorsqu’elle se tient loin d’eux à Bruxelles. Voter pour un maire pourquoi pas, pour un Président c’est amusant, pour un Eurodéputé, franchement, aucun intérêt. Cette abstention augmentera encore si un cinquième pouvoir émerge, un pouvoir réellement efficace à l’échelle de chacun.

Mais qu’est-ce que le cinquième pouvoir sinon une force extrême de décentralisation ? Dans le Wired de juin, l’article sur Le nouveau socialisme, article qui me rappelle celui publié en 2006 par Technikart, évoque cette nouvelle force autour de laquelle la gauche traditionnelle pourrait se reconstruire si elle était progressiste au lieu d’être corporatiste.

Je voudrais passer en revue trois idées de gauche et montrer comment ma vision, que je ne qualifie ni gauche, ni de droite, s’accorde avec elles.

Le partage

Nous ne pouvons laisser personne dans la misère, nous devons proposer une vie décente à chacun de nos concitoyens.

Qui n’est pas d’accord avec cette proposition ? À droite, certains diront que les travailleurs se sortent toujours des mauvais pas. Je ne le crois pas. Parfois, les malchances s’accumulent à tel point que nous sommes impuissants.

Nous avons besoin d’une politique sociale.

Mais où placer le curseur ? Comment définir la misère acceptable ? Je pense que c’est impossible, que définir cette limite n’a pas beaucoup de sens. En conséquence, une loi ne peut pas venir en aide aux plus défavorisés car elle ne peut les définir sans recourir à un curseur, un niveau de revenu par exemple.

Comment faire ?

Nous avons besoin de ressources à redistribuer. Que les riches paient pour les plus pauvres ne pose guère de problème. Mais, encore une fois, où se termine la pauvreté et où commence la richesse ? La gauche et la droite se battent souvent pour définir ces limites qui n’ont pas de sens.

Nous ne pouvons créer une société fraternelle que si nous cessons de nous battre pour le matériel. Une fois qu’il ne sera plus un objet de bataille ou de rêve pour nous, nous partagerons les richesses matérielles sans sourcilier, d’autant plus que la véritable richesse sera dans l’immatériel.

Quand on voit les choses comme ça, on comprend pourquoi la droite défend Hadopi. C’est une loi contre la dématérialisation, contre l’avènement inéluctable du nouveau socialisme.

L’égalité

La gauche veut limiter la pauvreté, elle veut faire fonctionner l’ascenseur social, elle veut réduire l’écart entre les riches et les pauvres.

Pour atteindre cet objectif, il suffit de décentraliser massivement. Chacun de nous sera ainsi plus proche des centres de décisions, chacun de nous sera plus proche de celui qui sera au plus haut, chacun de nous subira la loi de la même façon, chacun de nous pourra expérimenter… les vastes structures ne nous paralyserons plus.

La décentralisation massive est aujourd’hui possible car les technologies numériques permettent de faire éclater les pyramides au profit des réseaux auto-organisés comme l’évoque Chris Anderson dans Wired.

L’entraide

La gauche traditionnelle suppose que l’État doit venir en aide aux plus démunis. Elle se garde de proposer que chacun d’entre-nous vienne en aide à chacun d’entre nous. La gauche a-t-elle peur de ressusciter une forme de collectivisme ? A-t-elle peur des idées de gauche ?

Qu’est-ce que nous faisons sur Internet quand nous partageons des informations, répondons à des questions, écrivons des notices ? Est-ce que nous ne nous venons pas en aide ? Pourquoi ne pourrions-nous pas généraliser cette forme d’entraide ?